WUU2K 2023
Wellington Urban Ultra
Seulement 3 semaines après le marathon de Wellington, j’ai pris part au trail WUU2K 2023 sur le format 62km pour 2600m de dénivelé positif. Pas facile d’enchaîner ces 2 courses totalement différentes. Mais quand l’occasion se présente, comment refuser ?
Temps de lecture estimé : 9 minutes.
Un vendredi soir, mes amis Alex et Baptiste m’envoient un message :
Je n’ai pas prévu de course jusqu’à Taupo Ultra 100km en Octobre, mais j’ai des bonnes jambes en ce moment. Je viens de réaliser un bon marathon, je commence à accumuler pas mal de dénivelé depuis 6 semaines et je sors d’une semaine à 10h d’entraînement. En réalité, il n’y a pas grand chose qui me retient de faire cette course, sauf peut-être une douleur en genou droit.
WUU2K, c’est quoi ?
Wellington Urban Ultra-marathon, c’est une course créée en 2016 par 2 passionnées désireux d’organiser un événement qui ferait le tour de la capitale Néo-Zélandaise par les collines.
L’événement propose 3 distances : 21km, 43km et 62km. Il a lieu chaque année pendant l’hiver et attire de plus en plus de monde au fil des saisons. En 2016, il comptait 125 participants au total. En 2023, nous étions :
- 196 sur le format 21km
- 170 sur le format 43km
- 124 sur le format 62km
Ce qui a attiré mon attention, c’est le parcours. Le tracé passe par le Mont Kaukau que j’ai découvert la semaine avant la course, Red Rocks beach où je suis allé randonner avec Alex et Baptiste, et l’arrivée au Mont Victoria sur lequel je fais des aller-retour depuis 2 semaines. Le point commun de tous ces lieux : les paysages sont incroyables.
Pour en savoir plus, vous pouvez vous rendre sur le site officiel de l’organisateur.
Objectif du jour
Alex m’a informé que le plateau semblait relevé sur cet événement. En effet, le gagnant 2022, Sam McCutcheon, a terminé 4ème du TUM 102 de la TARAWERA qui est LA plus grosse course de trail du pays. Il commence à se faire un petit nom dans le Trail en Nouvelle-Zélande. Malheureusement, il n’est pas présent cette année.
Mon objectif avec cette participation est triple :
- Voir combien de temps je tiens à allure course. Ce format se gagne en un peu plus de 5h. Mon meilleur point de comparaison est Country to Capital où j’avais réussi à courir pendant 6h sans m’arrêter, mais en ralentissant à la mi-course
- Voir ce que je vaux par rapport aux meilleurs du pays en ce moment. Je suis convaincu que je peux performer avec un entraînement spécifique et régulier.
- Engranger de l’expérience sur des formats plus long que les courses sur route. Courir un marathon en 2h30 et gambader 6h+ dans la nature n’ont rien à voir.
Anecdote
L’événement a lieu le même week-end que celui où j’avais réalisé The Vanguard Way l’an passé. J’avais pu enchaîner 2 jours de marche de 60km, cette fois ci il n’y en a qu’un à faire mais en courant ! Un beau symbole.
Le choix des chaussures
Mes belles Nike Terra Kiger 8 étant bonnes pour la poubelle, cette course est l’occasion pour moi de renouveler ma paire de chaussures de trail. En réalité, je me suis cassé la figure sur de l’herbe humide en descente cette semaine et il est hors de question que je fasse une course avec des semelles lisses.
En 2018, j’avais opté pour les Hoka Speedgoat pour la Saintélyon. Comme j’aime essayer des modèles différents, j’ai opté pour les Asics Trabuco 11. Je dois avouer que le prix et la couleur ont influencé mon choix : 320 NZD pour les Hoka Speedgoat 5 contre 250 NZD pour les Asics Trabuco 11.
Récit de course
Première étape, le bus qui nous emmène du centre ville de Wellington jusqu’au point de départ. Pendant le trajet, je rencontre un type qui s’appelle Chris et qui a l’air chaud : 2h21 au marathon et une participation au Tarawera TUM 160km by UTMB.
Sur la ligne de départ, je retrouve le Chris qui discute avec un mec en débardeur. Les mecs en débardeur sur des trails, c’est pas des blagueurs. Chris me confirme que lui va partir devant et que Mr. Marcel va partir comme une balle, encore plus devant. PAN ! Top départ donné à 6h30 pour un lever de soleil vers 7h30. Je pars dans les 20-30 premiers, a vu de nez.
Départ ambitieux
On commence par une grosse montée jusqu’au sommet du Mont Kaukau et ça bouchonne un peu dans les premiers mètres. En Thaïlande, j’ai fait l’erreur de partir trop lentement et je n’ai jamais revu le top 10. Je ne veux pas refaire la même erreur alors je double pour être tranquille. Au bout de 2 bornes de côte, je me retrouve derrière Chris. On doit être dans les 10-15 premiers d’après mes estimations. Comme il fait nuit noire, je n’ai pas envie de courir seul de peur de louper une balise et de me perdre, alors je me fous derrière lui. À noter que le parcours est EXTRÊMEMENT bien balisé. Impossible de se tromper.
Ça court, ça court bien même, et je ne vois qu’un type devant nous qui va un peu plus vite. Au bout de 5 bornes, nous n’avons toujours rattrapé personne et je trouve ça bizarre parce qu’on cavale. Je passe devant Chris et je garde un bon rythme. À 10km du départ, toujours personne. Je lui demande : « Ils sont combien devant ? Très bizarre de ne rattraper personne en courant à 4’30 ». Il me dit « Euh, ils sont 3. » AH MAIS OUAIS C’EST POUR ÇA ! Mdr on court devant comme des oufs en fait. Après 15k de course, je commence à être un peu dans le dur. Je me dis que si ça continue à ce rythme, je vais exploser.
Gestion de l’effort
Je ralentis un peu, je m’arrête même pour une pause pipi et les 3 gars de derrière me reprennent. Très rapidement, 4 autres mecs me dépassent. Ça fait mal au coeur mais il faut être lucide, on est au km 20 et je suis déjà un peu fumé. Il reste encore plus de 40km à parcourir. Si je ne dis pas de conneries, il y a maintenant 12-15 gars devant moi et j’espère me les faire plus tard si ça va bien. Au 24ème kilomètre, je suis ravi d’arriver sur le ravito où je prends une gourde de boisson isotonique et une gourde d’eau.
L’allure moyenne est légèrement sous 6’00, ça fait 2h30 que nous sommes partis. Pour le moment, j’ai consommé 2 gels Maurten et une barre de céréales, en mangeant toutes les 40-45 minutes. Je commence à avoir légèrement mal au tendon rotulien du genou droit mais rien d’alarmant. Je cours tout le temps sauf les grosses montées. Il y a 2 mecs proches de moi, on se double de temps en temps, pour l’instant je fais ce que je peux pour ne pas ralentir. Les chemins changent, on alterne entre large chemin de terre, petit single en zigzag et passages dans les bois. C’est plaisant mais les montées/descentes me cassent un peu les pattes.
De 37 à 40km on descend vers la plage de Red Rocks. On croise les gens qui font le semi-marathon qui montent. Je m’amuse à leur faire des high five à tous. C’est 90% des gens de 40 ans et plus et je suppose qu’ils ferment la marche. Ça m’amuse pendant 15 minutes, je suis comme un gosse. J’ai l’habitude de parler à tout le monde sur les courses pour me distraire et ça commence maintenant. En même temps je me filme également, ce qui me fait perdre du temps sur les mecs autour de moi mais je m’amuse bien. Ça commence à être dur dur de courir tout le temps.
La résurrection
Nous arrivons sur la plage et ça me permet de voir loin, j’aperçois 4-5 mecs pas trop loin devant, c’est rassurant. Je cours toujours autour de 6’00. À la fin de la plage au km 45, on arrive au ravito où je reprends iso et eau. Je demande aux bénévoles combien de coureurs sont devant, ils me répondent « Moins de 10. T’es dans le top 10 c’est sûr ! » ce à quoi j’ai du mal à croire. Mon estimation est à 12 mais bon. À cet endroit, il y a des toilettes et je me dis qu’un arrêt pour Numéro 2 ne peut pas me faire de mal. Top chrono, 2 minutes montre en main : efficace et fort utile. J’ai perdu 3 places mais je me dis que je peux gagner bien plus que 2 minutes au cumulé !
À partir de 47km, on attaque une grosse côte qui mène à un point haut où on doit faire demi-tour pour redescendre. D’ailleurs, mon pote Émile qui a fait le déplacement à vélo pour m’encourager se trouve au pied de la côte ! C’est excellent et ça donne VRAIMENT ÉNORMÉMENT d’énergie. Cette portion permet de voir tous les mecs de devant qui redescendent. Je ne connais pas mon classement exact à ce moment là. J’arrive en bas de la montée PILE POIL quand le premier (Mr. Marcel) termine sa descente. Il court comme un malade avec un sourire jusqu’aux oreilles. Je suis content car je vais pouvoir compter et étudier la concurrence. En même temps que nous montons, il y a les gens du marathon qui descendent aussi ce qui fait de l’animation. Evidemment, je parle à tout le monde et ça m’occupe l’esprit.
Je ne sais pas si c’est les gels ou le ravito mais je me sens ULTRA bien dans la montée. Je marche vite et je cours même quand la pente est faible. Grâce à ça, je rattrape facilement 5-6 gars en seulement 4 km. Le deuxième de la course se trouve à 10 minutes du premier, viennent ensuite le 3 et 4ème 15 minutes après. Finalement 5 puis 6 qui entame la descente juste avant moi. P*tain, je suis 7ème à officiellement 12km de l’arrivée.
Quand on n’a pas de jambes, on a une tête
Malheureusement, maintenant il faut descendre environ 400m de dénivelé et j’ai le tendon rotulien qui chauffe à chaque pas. Punaise j’ai vraiment moyen de choper le top 10, hors de question que je laisse passer ma chance ! Je descends en boitant en gardant un peu la jambe tendue mais j’arrive quand même à courir. C’est inesthétique et douloureux mais faisable. Numéro 8 me double dans la descente mais je reste juste derrière lui. Je vois numéro 6 pas trop loin et il est plus lent que nous. En arrivant en bas, Émile me confirme que 6 et 7 sont prenables mais que 5 est assez loin devant.
Effectivement, je double mes 2 adversaires au bout d’un kilomètre seulement et je me retrouve 6ème punaise ! Il reste 10 bornes seulement d’après ma montre. Je cours, je cours, c’est moche mais j’avance ! À 4km de l’arrivée, le 7ème au T-shirt bleu me talonne et je demande aux bénévoles quelle distance il reste jusqu’à l’arrivée : 6km.
Zut, ça fait 2km de plus que prévu, je n’ai quasiment plus d’eau et le mec ne me laisse aucun répit ! Avec humour, je le supplie de ralentir pour me laisser tranquille. Il est catégorique, c’est jusqu’à la ligne mon pote ! Ce gars au T-shirt bleu, c’est celui qui a fait demi-tour juste devant moi au kilomètre 50 en haut de la grosse côte. À cause mais surtout grâce à lui, j’ai couru les 10 derniers kilomètres pour garder ma place alors que je suis réellement démoli. C’est beau la puissance de l’esprit. Par contre, la puissance de l’esprit est incapable de stopper mon début de crampe à l’adducteur gauche. Mon adversaire me dépasse mais je m’accroche.
Une fin rocambolesque
Au kilomètre 62, à moins de 2 kilomètres de l’arrivée, il est 100m devant moi et je vois un autre gars débouler derrière ! Mais non, pas ça, pas maintenant, pas après tout ce que j’ai fait ! Je suis sec ! Malheureusement, d’après une bénévole, il reste encore 1,7 kilomètres !
Ce gars fini par me doubler et je cours tant bien que mal pour les garder à vue tous les 2. C’est comique à voir car le 6ème en bleu, le 7ème en orange et moi sommes tous à 10 mètres les uns des autres. Quand le premier marche, nous marchons tous. Quand il se remet à courir, on le copie. À ce moment de la course, je serais prêt à les payer pour qu’on se mette tous à marcher jusqu’à la fin tellement j’ai mal partout. C’est une sensation atroce.
Je me retourne et je vois la première femme qui revient sur nous !!!!! Non !!!!! Nous sommes 4 au coude à coude après presque 7h d’effort ! Le 6ème en bleu court toujours mais le 7ème en orange se remet à marcher. En le doublant, je lui dis « c’est pas le moment mon pote, il y a une autre personne juste derrière ! » Le bougre me repasse devant aussi sec. Au dernier virage, on aperçoit ENFIN l’arche d’arrivée avec seulement 200m à parcourir.
Je suis alors en 8ème position, à 40m du 7ème. Comme un coureur cycliste, je lance mon MEILLEUR sprint par surprise, pour essayer de coiffer le T-shirt orange au poteau. Moi, le coureur sur route, je suis certain de me le faire au sprint, surtout qu’il semble avoir autour de 35 ans. Mais il faut croire que ce type a un passé de sprinteur car il réussit à matcher ma vitesse de pointe avec beaucoup moins d’élan !!!! Résultat, il termine à une enjambée devant moi, 1 seconde d’avance au chrono final.
Bilan
Bilan des courses, je termine 8ème de ce WUU2K 2023 en 6h48’55. Il n’y a que 29 secondes qui séparent le 6ème au t-shirt bleu et la première femme, 9ème. Une fin de course incroyable où l’esprit de compétition à permis à tout le monde de se surpasser !
De mon côté, je visais un podium mais je suis bien satisfait de ma course quand même. Je n’aurais pas pu faire mieux. Malgré les douleurs, j’ai réussi à continuer à courir pour l’égo. Comme d’habitude, ayant annoncé un gros classement, je ne pouvais pas me ridiculiser en terminant 20ème. Avec seulement 3 semaines entre le marathon de Wellington et le trail, je ne pouvais pas faire des miracles. Maintenant, place à la récupération avec minimum une semaine complète sans courir, prolongeable en fonction de mon genou.
5 erreurs à ne pas reproduire :
- Oublier de me couper les ongles de pied avant la course
- Prendre des barres de céréales au lieu de compotes
- Partir trop vite sur la première partie de course
- Ne pas avoir retiré mon coupe vent après le levé du soleil
- Avoir zappé le dernier ravito, par peur de perdre du temps
5 réussites :
- Croire au top 10 jusqu’à la fin malgré les douleurs
- La pause WC de 2 minutes qui m’a fait gagner beaucoup de temps au final
- Avoir couru toutes les passages plats et les descentes
- Alimentation et hydratation régulière, sauf les derniers 6 km
- Le partage avec les bénévoles et les autres coureurs
Le mot de la fin
Pour terminer, je remercie l’organisation de m’avoir offert le dossard, sans quoi je n’aurais pas participé. C’était vraiment une très belle course, avec des paysages de malade et des bénévoles dévoués. Petit big up à Shoe Clinic Wellington qui m’a fait un petit rabais sur les chaussures juste parce que j’ai demandé ahah.
Sportivement, je n’avais jamais vécu une fin de course aussi tendue et stimulante. À notre niveau d’amateur, c’est plaisant de se tirer la bourre pour atteindre un classement. À bientôt, la prochaine course sera surement Taupo Ultra pour mon premier 100km en Octobre 2023.
Si tu as des questions ou des remarques, n’hésite pas à laisser un commentaire !