BLESSURES #1
le syndrome de l’essuie-glace
« Je ne peux plus faire de sport, je me suis blessé il y a 12 ans et depuis j’ai mal. »
Trop de fois j’ai entendu cette phrase qui me rend fou systématiquement. Dans cette série qui parle de blessures, je veux vous parler de mon expérience, mes apprentissages et mes solutions.
Temps de lecture estimé : 7 minutes.
Ce premier article traite du syndrome de l’essuie-glace. Pour illustrer, je vous raconte mon expérience : cause, gestion du problème, solutions et apprentissages.
Vous pouvez retrouver l’ensemble de mes articles qui parlent de blessures ici.
DISCLAIMER
Je ne suis ni coach sportif, ni professionnel de santé. Tout ce que je dis est basé sur mon expérience personnelle et mes recherches. Ce que je dis n’engage que moi.
On trouve littéralement tout et son contraire dans les avis médicaux concernant les blessures. Dans le cadre de l’entraînement sportif, deux choses sont sûres :
- le meilleur moyen d’éviter les blessures est LA PROGRESSIVITÉ
- il est impossible de s’entraîner sérieusement sans douleurs, même minimes.
En cas de doute, consultez un professionnel de santé. Pour plus d’informations sur les blessures du coureur, vous pouvez consulter le site de La Clinique du Coureur.
Contexte
2014, j’ai 19 ans et je veux participer à mon premier marathon. Ma mentalité : si un rêve n’est pas réalisé rapidement, alors on ne le fera jamais. J’ai cette idée de marathon en tête depuis 2-3 ans, il est temps d’agir. Je m’inscris au marathon de Paris 2015 dès le jour de l’ouverture, début Septembre 2014.
À l’époque, je suis étudiant en classe préparatoire à Reims et je participe au Semi-marathon puis au 10km de Reims le même jour, le 19 octobre 2014. Je réalise mon record au Semi-marathon en 1h33’52 où je me classe fièrement 4ème Junior sur 32. Je termine le 10km en 54 minutes, tant bien que mal. Avec 31 km de course dans la même journée, je me dis que je suis dans une bonne forme physique. Je continue à courir 2 à 3 fois par semaine jusqu’aux fêtes de fin d’année. Pendant les vacances de décembre, je profite de mon temps libre pour enchaîner les sorties, plus fréquentes qu’à mon habitude.
Première douleur
Dès janvier, je commence à ressentir une douleur à l’extérieur du genou droit. Cette douleur persiste et je la ressens même en marchant. C’est une tendinite du tenseur du fascia lata (ou TFL), également appelée « syndrome de la bandelette ilio-tibiale » ou « syndrome de l’essuie-glace ».
Pas de panique, tout ceci est très simple si on prend les choses dans l’ordre. Je vous explique.
L’anatomie pour les nuls : le TFL, c’est quoi ?
En anatomie, les tendons relient les muscles aux os.
Le tenseur du fascia lata est un muscle antérieur des fessiers qui se trouve sur la partie latérale de la hanche.
La bandelette ilio-tibiale est un long tendon (fascia) qui s’étend du bassin jusqu’en haut de l’os du tibia. Elle couvre la totalité de la partie externe de la cuisse avec pour fonction de stabiliser le genou.
Le syndrome de l’essuie-glace concerne l’inflammation de la bandelette, très sollicitée pendant a course. En se déplaçant de l’avant vers l’arrière (comme un essuie-glace), elle vient frotter contre la partie externe de l’os du genou entrainant son inflammation.
Pour plus d’informations, vous pouvez consulter le site de La clinique du coureur, une mine d’or.
Cette blessure, très courante chez les coureurs, n’est pas grave. Une des raisons principales est l’augmentation trop rapide de la charge d’entraînement. Tiens tiens, c’est EXACTEMENT mon cas. À l’époque je me rends chez le médecin, il m’indique que je dois réduire mon activité, me préconise le glaçage et me prescrit une genouillère articulée pour la course, un gros bazar encombrant. Je me renseigne de mon côté et je trouve une série d’étirements qui semblent efficaces.
Tant que j’ai mal au repos, je stoppe mon entraînement : arrêt presque complet. J’effectue quelques étirements mais la douleur persiste. Je suis inscrit au Semi-marathon de Paris début mars et au marathon début avril. Comme j’ai payé mon dossard pour les 2 courses (50€ + 100€), j’ai bien l’intention d’y participer, peu importe mon niveau d’entraînement (stupide). Pour limiter l’impact de la course sur mes genoux, je me dis qu’il faut que j’achète des chaussures qui absorbent bien les chocs. Chez Décathlon, je m’équipe d’une paire de baskets ASICS KAYANO 21 à 155€. Au bout de 6 semaines, à raison d’une course par semaine, la douleur semble être partie.
Semi-marathon puis Marathon de Paris 2015
Le 8 mars, je me présente sur la ligne de départ du semi de Paris. Je ne suis pas entrainé et la chaleur est à mourir pour un mois de mars. Je passe la ligne d’arrivée dans la difficulté en 1h54, sans trop de douleur au genou. Entre le 8 mars et le 12 avril, j’effectue 4-5 footings pour la forme mais j’ai peur que la douleur revienne. Malgré mon faible entraînement, je me pointe au marathon de Paris 2015 avec ma grosse genouillère et mon caleçon rouge porte bonheur.
Anecdote
Comme un énorme NULLOSS, j’achète des lacets élastiques la veille de la course, sur le salon du running. Vous savez, les trucs de triathlète pour leur permettre d’enfiler leur baskets rapidement à la transition pour repartir vite. Evidemment, ils n’ont AUCUN intérêt pour un marathon.
Une des règles de base c’est : ne jamais tester du nouveau matériel le jour de la course.
Je m’élance sur le marathon avec mes plus beaux lacets jaune fluo. En partant doucement, je passe les 10km en 1h, les 20km en 2h et les 30km en 3h. Au bout de 3h, extinction des feux. J’ai les pieds compressés sous l’effet des lacets bien trop serrés. La galère est tellement importante que j’appelle mon frère pour lui dire :
« C’est la chose la plus dure que j’ai faîte de toute ma vie. »
Sous vouloir être dramatique, c’est réellement mon effort physique le plus intense à 19 ans. Tout en faisant des milliards de calculs mentaux pour estimer mon temps à l’arrivée, je marche péniblement jusqu’à la ligne. Résultat final : 4h47, à bout de force mais sans douleur au genou. Un suplice que je ne souhaite à personne.
Analyse des erreurs
Avec du recul, jetons un coup d’oeil aux erreurs commises.
- La genouillère articulée. D’après moi, elle n’était pas vraiment nécessaire, la douleur étant due à une inflammation et non un manque de maintien du genou. Dans tous les cas, elle a eu un effet placebo certain.
- L’achat de chaussures maximalistes. Dans mon cas, la douleur est apparue suite à une augmentation trop rapidement l’entraînement sur un corps pas préparé. Des chaussures avec beaucoup d’amorti ne vont pas renforcer mon tendon qui relie fessiers et tibia. Des chaussures plus classiques auraient suffi.
- L’arrêt (presque) complet de l’entrainement pendant 6 semaines. Le corps s’adapte quand il est soumis à des contraintes. Si on arrête de courir, on stoppe les adaptations. La tendinite peut diminuer mais on dés-entraîne tout le corps : muscles, os, tendons, système cardio vasculaire. Ainsi, la reprise est plus lente. Donc l’arrêt 2 semaines et une reprise progressive, c’est oui. L’arrêt pendant 1 mois et demi puis un marathon, c’est non.
Mes solutions pour gérer la blessure
Dorénavant, quand je ressens des douleurs similaires et des alertes, je sais comment réagir. Je réalise les mouvements d’étirements appris, je glace mon genou autant que possible (2 voire 3 fois par jour si possible), je réduis la durée de mes courses et l’intensité mais je garde la fréquence. Ainsi, je ne me dés-entraine pas complètement.
Pour être certain que l’usure de mes chaussures ne soit pas la cause d’une blessure, j’utilise plusieurs paires à l’entrainement. Quand je ne vis pas avec un sac à dos en guise de maison, j’alterne avec 3-4 voire 5 paires différentes simultanément. Ainsi, elles s’usent moins vite.
Au fil des années, j’ai réduit l’allure de mes footings. Alors que je courrais mes footings faciles à allure 5’00/km quand j’avais 18-20 ans, je n’hésite plus à courir à 5’30 et plus lent maintenant. Les sollicitations et tensions sont réduites, mon corps à plus de temps pour s’adapter progressivement.
En période de reprise d’entrainement après une coupure, j’essaie si possible de privilégier l’entraînement croisé. C’est à dire que si j’ai le temps de m’entrainer beaucoup mais que je ne veux pas me blesser, je vais courir une journée et faire du vélo le lendemain pour diminuer les chocs. La natation est également un excellent sport porté (sans impact) pour diminuer l’impact sur les jambes tout en faisant travailler son cardio.
Apprentissages
Est-ce que ma méthode pour gérer une blessure est la meilleure ? Je ne sais pas, mais cela fonctionne sur moi. Je suis maintenant conscient que le syndrome de l’essuie-glace est une blessure classique, sans gravité et généralement liée à une augmentation de la charge trop rapide. La première fois que j’ai eu cette douleur, j’ai paniqué et j’ai essayé plein de choses pour essayer de faire disparaitre ma douleur. Je me voyais déjà en fauteuil roulant à 20 ans.
Suite à ça, à chaque fois que cette douleur sur l’extérieur du genou est revenue, j’ai réussi à la contenir pour ne pas qu’elle empire tout en continuant à m’entraîner, jusqu’à ce qu’elle disparaisse.
En préparation du marathon de Paris 2022, ma revanche sur 2015, j’ai eu une douleur au genou similaire mais moins localisée et plus diffuse. Je n’ai pas consulté de médecins généraliste, je me suis orienté vers un ostéopathe plus spécialisé dans le sport. La douleur intense n’a durée que 2 semaines. Ensuite, la douleur a persisté mais seulement pendant et après mes sorties longues de 20km et plus du week-end. J’avais systématiquement mal le lendemain mais pas 2 jours après. La douleur ne s’aggravant pas, je continuais l’entrainement normal. Cela m’a permis d’atteindre les 2h42 sur le marathon.
Le mot de la fin
Il existe des dizaines de façons de se blesser mais la plupart des blessures sont banales et se soignent facilement.
Au final, le meilleur remède pour moi contre une tendinite est simple, basique :
Bon entraînement à tous et prenez soin de vous.
Si tu as des questions ou des remarques, n’hésite pas à laisser un commentaire !